Cela fait onze ans que je suis membre du Parti socialiste. Durant ces onze années, j’ai été surpris de voir à quel point un certain fatalisme s’est installé à gauche. Trop souvent, l’argument « on ne peut pas faire autrement », « ne lançons pas un combat perdu d’avance » ou encore la sentence « c’est impossible » ont ponctué les débats comme autant d’objections imparables.
Cet état d’esprit est une faute politique.
L’UDC l’emporte presque systématiquement quand elle veut restreindre les droits des étrangers, certes, mais cela nous impose-t-il de nous laisser piéger dans une bataille où nous ne sommes que réactifs, sur la défensive ? Non, lançons une initiative pour donner le droit de vote et d’éligibilité au plan fédéral aux étrangers résidant de longue date en Suisse, qu’importe le résultat final !
Le PLR et le reste du camp bourgeois attaquent à coup de butoirs nos assurances sociales, avec des succès divers ? Lançons des initiatives fédérales pour le congé paternité et pour augmenter les rentes AVS, qui ne permettent plus de vivre dignement sa retraite !
Le financement de la LAMal nous impose des réorganisations au détriment des patients ? Regroupons nos forces pour dire à la Berne fédérale que son modèle de politique de la santé, avec une concurrence biaisée qui laisse les bénéfices au privé et les déficits au public, n’est pas notre idéal. Rédigeons une initiative fédérale pour un système de santé public, social et universel plutôt que de nous écharper en tirant sur ceux qui n’ont d’autre choix que d’appliquer les décisions fédérales dans notre canton !
Les salariés sont toujours plus victimes de mobbing, le souverain ne veut pas de salaire minimum ? Exigeons que soient renforcées les conventions collectives de travail et facilitée l’instauration de leur force obligatoire !
Comprenons-nous bien : se battre contre les propositions inadmissibles du Parlement fédéral (ou cantonal) est nécessaire, mais insuffisant. Nous devons aussi proposer, proposer, toujours proposer même si finalement, dans un pays où nous sommes minoritaires, nous perdrons souvent. Nous ne pouvons pas faire l’économie de réflexions fondamentales sur le modèle helvétique, qui doivent déboucher sur des idées novatrices et susceptibles de convaincre le souverain. Surtout, nous devons renforcer notre militantisme, qui permet à la gauche d’avancer. C’est dans la rue, en battant le pavé, sous la pluie, où chaque signature récoltée est une victoire, que nous progressons, beaucoup plus que dans des parlements où, minoritaires, nous sommes contraints de batailler pour la moins mauvaise des solutions.
Sa force de proposition fait du Parti socialiste un parti progressiste, à l’avant-garde du progrès social, bref, un parti dynamique dans lequel on a envie de s’investir. Je préfère mille fois perdre des votations que de me perdre dans un fatalisme qui nous immobilise.
Refuser le fatalisme politique est nécessaire à l’épanouissement de nos idées, fût-ce au prix de quelques douloureuses défaites.
Le Point n°305
Évitons le piège du fatalisme !
La campagne est riche de thèmes imposés. Imposés par l’actualité, les médias mais aussi la réalité du terrain, bien sûr. C’est pourquoi nous avons choisi d’offrir aux candidat-e-s un espace hors des contraintes habituelles. Voici leurs contributions.
17. juin 2015